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Communiquer en période de crise

Communiquer en période de crise
La crise que nous vivons est sans précédent. Il s’agit moins pour les responsables communication de protéger la réputation de leur établissement que de permettre aux personnels et aux étudiants de continuer à travailler et à étudier dans les meilleures conditions, sans oublier l’obligation d’assurer la continuité du service public d’enseignement supérieur dans les établissements publics. L’Arces a souhaité prendre un peu de recul en interrogeant Hervé Monier, expert en communication et marketing, à qui nous avons demandé quelques conseils pour gérer au mieux cette communication de crise.

QUELS SONT, SELON VOUS, LES PRINCIPAUX RÉFLEXES À ADOPTER POUR LES RESPONSABLES COMMUNICATION DES ÉTABLISSEMENTS EN CE MOMENT ?  

Il s’agit moins de protéger ou de promouvoir la réputation des établissements vis-à-vis des publics externes que d’assurer la continuité des enseignements et la relation avec les enseignants et personnels administratifs d’une part, les étudiants et leurs parents d’autre part. Dans un premier temps, il faut communiquer sur les mesures et les décisions prises, rassurer et mettre en place des solutions souples et adaptées pour permettre à chacun d’assurer et de suivre les cours ; mobiliser des ressources et des canaux directs (lignes et mails dédiés à chacun : enseignants, étudiants…) pour continuer de répondre à toutes leurs questions et expliquer simplement les modalités des enseignements ou du travail à distance. Les communicants se doivent d’être proactifs et réactifs aux nouvelles demandes, sans se laisser emporter par la précipitation quand les réponses ou les solutions aux problèmes rencontrés ne sont pas encore connues ou mises en place. L’important est que chacun ait en permanence une visibilité maximale sur l’action de l’établissement et les modalités de travail.  
 

QUELS SONT LES OUTILS À PRIORISER ?

Les solutions et applications utilisables pour continuer d’assurer les cours et les réunions à distance sont potentiellement nombreux : Zoom, Teams, WhatsApp, Skype, Facebook Live… A chacun de définir les outils les plus adaptés, en fonction de ses besoins et surtout des critères de sécurité et de protection des données préalablement définis et communiqués par l’établissement. 
L’idéal est évidemment d’utiliser les outils de l’établissement à bon escient en s’appuyant sur des solutions techniques prédéfinies et déjà testées en amont dans le cadre d’un plan de continuité d’activité, et éviter ainsi que chacun fasse un peu ce qui lui plait, même si l’essentiel reste d’assurer les enseignements. 
 

QUEL EST LE « BIORYTHME » DE CETTE COMMUNICATION DE CRISE BIEN PARTICULIÈRE ? 

Plus fréquente et récurrente il y a quelques semaines, quand il s’agissait d’informer la communauté sur la fermeture des établissements et les mesures barrières à respecter, la communication peut adopter un rythme un peu moins soutenu en phase de confinement. Il faut évidemment garder le lien et communiquer en cas de nécessité, au gré des initiatives et nouvelles mesures prises par l’établissement, mais en veillant à ne pas « spammer » vos premiers publics, car il s’agit avant tout de ne pas perdre leur attention et leur confiance. De la communication « utile » donc, mais attention aux effets d’annonce qui pourraient être démentis par la suite : rien de pire que la précipitation et l’improvisation quand nul n’attend particulièrement vos messages.
 

FAUT-IL SELON VOUS CONTINUER À COMMUNIQUER À L’EXTERNE ? MONTRER PAR EXEMPLE AUX JOURNALISTES ÉDUCATION QUE LES UNIVERSITÉS ET LES ÉCOLES CONTINUENT D’ASSURER LEURS MISSIONS ? 

Oui, bien sûr. Même si la période actuelle est particulièrement sombre et difficile, les écoles et les universités peuvent légitimement être fières de ce qu’elles ont su mettre en place pour continuer d’assurer leur mission, l’enseignement, et de permettre à leurs étudiants de passer leurs examens et concours.
Gare à la surenchère cependant. J’ai commencé depuis peu à recevoir de nombreux communiqués de presse émanant des écoles et vantant leur capacité d’adaptation et d’innovation au service de leurs étudiants. S’il est tentant de montrer son savoir-faire, son agilité organisationnelle et sa maîtrise des nouvelles technologies, les premiers de ces communiqués seront davantage lus que les suivants… Attention donc à conserver une communication « équilibrée » et à ne pas franchir le Rubicon d’une communication promotionnelle intempestive et déplacée en ces temps de grave crise sanitaire.

Attention donc à conserver une communication « équilibrée » et à ne pas franchir le Rubicon d’une communication promotionnelle intempestive et déplacée en ces temps de grave crise sanitaire 

SUR QUOI D’AUTRE LES ÉTABLISSEMENTS PEUVENT-ILS COMMUNIQUER EN CE MOMENT ?

En dehors de communiquer sur la continuité de leur mission éducative, il appartient aussi et surtout aux écoles et aux universités de communiquer localement sur les initiatives de solidarité qu’elles auront su déployer pour leur communauté environnante et les professionnels les plus exposés de leur ville, leur département ou leur région, illustrant leur dimension citoyenne. Ceci est à mon sens tout aussi légitime et intéressant qu’une communication nationale qui se heurtera rapidement à la prolifération des messages et à l’indifférence (au mieux) des lecteurs.  
 

QUELS CONSEILS DONNERIEZ-VOUS LORSQU’IL FAUDRA ABORDER LA SORTIE DE CRISE ?  

Il est encore difficile d’en juger, mais la sortie de crise sera sans doute progressive, avec des régions et des établissements qui seront peut-être autorisés avant les autres à accueillir de nouveau des étudiants et enseignants dans leurs amphis. Il faudra dans ce cas retrouver les réflexes de la première phase de crise : privilégier l’information utile et indispensable, le rappel des gestes barrières et consignes à respecter pour s’assurer de la santé de chacun. Et gérer les nouvelles recommandations gouvernementales avec sérieux en dédramatisant progressivement les communications, pour célébrer aussi le plaisir de se retrouver dans tous les établissements 100% opérationnels. Là encore, la réputation sera moins importante que la communication à destination des publics premiers des écoles et universités : enseignants et administratifs, étudiants et leurs familles.
 

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